
Vers une meilleure prise en charge des soins et dispositifs liés au cancer du sein : la loi du 5 février 2025… et ses maladresses
Le 5 février dernier, l’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté une nouvelle loi concernant la prise en charge des soins et dispositifs spécifiques au traitement du cancer du sein, par l’assurance maladie. On vous l'a dit sur Instagram, sur le papier, on ne peut que saluer cette avancée… Mais dans les faits, on avoue être un petit peu contrariées. Aujourd’hui, on vous partage donc notre avis et notre ressenti sur cette loi, qui nous semble indispensable, mais un peu… maladroite.
Le reste à charge : un véritable stigmate invisible du cancer
En janvier dernier, nous avons évoqué sur le blog un sujet trop souvent oublié : celui des stigmates invisibles liés au cancer. Parmi les différents stigmates évoqués, nous avons bien évidemment parlé de ce que représentaient les frais annexes à la maladie, que l’on pourrait également appeler “restes à charge”.
Pour rappel, voici les éventuels frais annexes qui incombent à une personne touchée par le cancer :
- les produits et soins non remboursés et pourtant indispensables pour atténuer les effets secondaires des traitements (crèmes, produits lavants adaptés, vernis à base de silicium… tout ce qui se rapporte aux produits dits de “dermo-cosmétique”)
- les accessoires comme la lingerie adaptée, les perruques, les prothèses capillaires partielles, les accessoires de tête…
- les frais liés au transport pour se rendre à l’hôpital (qui ne sont pas toujours pris en charge à 100 %)
- les frais liés à la garde des enfants, lorsque l’on doit se rendre à des rendez-vous médicaux
- les séances de soins de supports, comme les séances de socio-esthétique, d’activité physique adaptée, d’ostéopathie, etc. (Par ailleurs, on leur prête également le nom de “soins de confort” : chez Les Franjynes, nous ne sommes pas d’accord avec ce terme, ce sont des soins plus que nécessaires quand on traverse la maladie, le confort n’a rien à voir là-dedans).
- les dépassements d’honoraires, parfois scandaleux, n’ayons pas peur de le dire, pratiqués par certains professionnels de santé.
Bref, la liste est non exhaustive, et pourtant, le portefeuille des personnes touchées par la maladie, lui, n’est pas extensible. Surtout quand, pour rappel, on sait que le cancer interrompt bien souvent l’activité professionnelle, et entraîne une baisse de revenus généralement significative.
C’est donc la double, triple, quadruple… peine ! On ne choisit pas la maladie, on ne choisit pas d’arrêter de travailler, et en plus, on se retrouve à devoir payer beaucoup d’argent pour essayer de s’en sortir dignement.
De tout cela peut résulter une immense précarité, et un refus de certains soins de la part de certains patients. Ainsi, on estime par exemple que 15 % des femmes ayant subi une mastectomie dans le cadre du cancer du sein renoncent à la reconstruction mammaire pour des raisons exclusivement financières.
En novembre 2024, une enquête a d’ailleurs été publiée par France Asso Santé. Elle porte sur le reste à charge invisible. Les personnes ayant répondu ne sont pas toutes touchées par le cancer : certaines ont des maladies chroniques, des handicaps, une perte d’autonomie, etc. En conclusion, cette étude a tout de même mis en évidence un reste à charge d’environ 1 557 € par an (et jusqu’à 8 200 € pour les 10 % de personnes qui déclarent le plus de frais liés à leur santé). Des frais exorbitants pour des personnes qui, rappelons-le, n’ont rien demandé, et dont les cancers diagnostiqués sont très souvent et de plus en plus dus à “des facteurs environnementaux” sur lesquels elles n’ont aucun pouvoir à titre personnel, tant que le collectif ne se sera pas mis d’accord pour agir vraiment et concrètement.
La loi du 5 février 2025 : une première avancée vers une meilleure prise en charge des soins et dispositifs liés au cancer du sein
En février dernier, une loi a donc enfin été adoptée, afin d’apporter des réponses et une aide concernant ce reste à charge dans le cadre du cancer du sein. Il aura malheureusement fallu attendre qu’une députée, elle-même touchée personnellement, prenne la parole avec son turban chimio pour envelopper son alopécie pour qu’enfin, on daigne mettre la lumière sur ce fléau.
Ceci est frangement triste quand on sait depuis combien de temps les associations de patients, les patients eux-mêmes et autres professionnels du cancer demandent à ce que l’on se penche enfin sur cette problématique des plus dramatiques et essayent de concert de porter tout ceci aux oreilles de notre gouvernement.
Cette nouvelle loi prévoit ainsi d’apporter un soutien financier afin d’aider les femmes touchées par le cancer du sein à assumer les frais annexes liés à la maladie.
Un forfait doit donc être déterminé dans le but de prendre en charge les produits non remboursés (comme ceux de dermo-cosmétiques évoqués plus haut, par exemple), la lingerie, les perruques... Il est aussi envisagé d’établir un budget pour les frais liés à la garde d’enfants. Le Gouvernement veut également remettre au Parlement un rapport permettant d’encadrer la pratique du tatouage définitif de la plaque aréolo-mamelonnaire et les modalités de sa prise en charge.
Enfin, cette loi souhaite imposer un plafond afin de limiter les dépassements d’honoraires des professionnels, notamment dans le cadre des actes de chirurgie de reconstruction mammaire.
Ce dernier point semble faire un peu polémique… En effet, ces dépassements sont communs dans les cliniques : les femmes se tournent vers elles, car les délais dans les établissements publics sont extrêmement longs. Pour certaines patientes, plus tôt la reconstruction est faite, plus vite elles peuvent avancer et laisser derrière elles la maladie. La clinique est en quelque sorte leur seule option, et reste, de ce fait, très coûteuse. Plafonner les actes de chirurgie de reconstruction mammaire permettait donc à davantage de femmes d’y avoir recours… et on sait comme cela peut-être important dans la reconstruction aussi bien physique que émotionnelle en post-maladie.
Le problème de la loi du 5 février : une hiérarchisation des types de cancers
Dans les faits, cette loi est plus que bienvenue, vous l’aurez compris. Seulement, qu’en est-il des personnes touchées par d’autres cancers ? En est-on venus à hiérarchiser le type de cancer ?
Que l’on soit concerné par un cancer des poumons, de la gorge, du foie, des os, du sang ou encore de la prostate, la peau est abîmée de la même façon par les traitements, les cheveux peuvent également tomber, le matériel de soins annexes est également indispensable, et les enfants ne vont pas se garder tout seuls non-plus.
Avec cette loi, on peut donc s’interroger sur le message qui est envoyé à des milliers de personnes malades, qui souffrent elles aussi de ce reste à charge. Les patients auraient-ils dû mieux choisir leur cancer afin d’obtenir une reconnaissance de la situation financière dans laquelle la maladie les plonge chaque mois ? Ceci est effarant !
Alors oui, certains diront que c’est un premier pas et qu’il faut bien commencer quelque part, mais était-il vraiment nécessaire d’établir une telle différenciation ?
Dans tous les cas, le Gouvernement dispose encore d’un délai de 6 mois pour présenter au Parlement la potentielle mise en œuvre de cette loi. Et avec le contexte actuel que nous connaissons tous, il semble légitime de nous interroger sur sa mise en place effective.

Alors, même si j’ai envie d’y croire, parce que comme je le dis toujours, c’est avec de petites briques que l’on construit de grands murs, je suis consternée pour l’ensemble de mes sœurs et mes frères de combat qui luttent chaque jour, et je tiens à leur dire que le combat continue… peu importe le type de cancer, peu importe l’âge ou encore le sexe. Je n’ai qu’un seul message à vous faire passer : restons unis et soudés dans ce combat qu’est celui de la maladie !
N’hésitez pas à nous partager votre avis au sujet de cette nouvelle loi concernant la prise en charge des soins et dispositifs spécifiques au traitement du cancer du sein. On est toujours ravies de pouvoir échanger avec vous sur nos réseaux sociaux Facebook, Instagram, TikTok et Pinterest.
Avec tout notre soutien et notre amour de sœur de combat !
Sources :